mercredi 29 février 2012

J'ai été voir... Au Pays du Sang et du Miel



Quand Angelina Jolie décide de mélanger sa conscience humanitaire et son métier de star d’Hollywood, elle se retrouve aux manettes d’un film sur la guerre de Bosnie. Film dont elle a elle-même écrit le scénario (même si elle est actuellement accusée de plagiat par un journaliste croate) et pour lequel elle passe pour la première fois derrière la caméra.

L’histoire qu’elle nous raconte est celle de Danijel, serbe et Ajla, musulmane. Avant la guerre, ils s’aimaient. En 1992, elle se retrouve prisonnière dans le camp qu’il commande. Ils vont continuer cette relation tout au long de la guerre, alors que tout les oppose.

On le sait d’emblée, le sujet est lourd et on ne va pas ressortir avec le sourire.
J’aime généralement les films de guerre réalisés par des femmes (notamment l’excellent Démineurs de Kathryn Bigelow) : je trouve que leur sensibilité est différente, tout comme leur volonté de comprendre et de témoigner.

Angélina Jolie a bien fait ses devoirs : Au Pays du Sang et du Miel est le fruit d’un travail de recherche approfondi à propos de la guerre en ex-Yougoslavie. Avant de se lancer, elle a fait lire son scénario (anonymé) à des spécialistes ; le film a par ailleurs été bien reçu, notamment par des journalistes de guerre qui avaient couvert le conflit.

Sans volonté partisane, Au Pays du Sang et du Miel raconté une histoire au sein de cette guerre, sans chercher à expliquer. Il n’empêche que l’on sent l’indignation de la réalisatrice face à la non-intervention de la communauté internationale. Jolie dénonce également les violences faites aux femmes en temps de guerre (âmes sensible s’abstenir, les scènes de viol sont choquantes)

Pour montrer à quel point ce conflit a opposé des gens qui avaient beaucoup en commun, on suit cette histoire d’amour entre un homme et une femme qui sont dans deux camps opposés. Et là, je n’ai pas réussi à y croire. Soit c’est justement trop incroyable en comparaison du contexte qui lui est très crédible ; soit c’est parce qu’on reste trop en surface… sans doute un peu de tout ça.
A force de vouloir faire passer son message, la réalisatrice nous fait perdre le fil de cette histoire, à laquelle je n’ai pas adhéré.

Le tournage ayant eu lieu en langue serbe, j’imagine que la direction des acteurs n’a pas été facile. Acteurs qui sont d’ailleurs des « locaux », certains d’entre eux ayant eux-mêmes vécu la guerre. Mais aucun d’eux ne crève l’écran…

Après ce film, on est donc sensibilisé au sujet (un conflit si récent, si violent et si proche) mais, au final, on a juste envie qu’un autre réalisateur s’en empare pour nous faire vraiment vibrer.

La petite anecdote
Le tournage du film en Bosnie a un temps été annulé suite à une rumeur dans la presse qui avait mal interprété le sujet du film et qui avait déclenché l’indignation des associations de victimes du conflit. Le Ministre de la Culture a finalement autorisé le tournage après avoir lu le scénario.

Infos pratiques
Au Pays du Sang et du Miel
sorti le 22 février 2012 en France
réalisatrice : Angélina Jolie
avec : Zana Marjanovic, Goran Kostic

mardi 28 février 2012

J'ai été voir... Sécurité Rapprochée



Les réalisateurs suédois ont du succès et les films d’espionnage leur conviennent bien. Après Tomas Alfredson pour La Taupe, c’est ici, c’est Daniel Espinosa qui réalise Sécurité Rapprochée. On parle bien d’espions dans les deux films mais c’est à peu près leur seul point commun…

Le titre original en anglais Safe House (« La Planque ») plante le décor : Tobin Frost (Denzel Washington) est un ex-agent brillant de la CIA qui a déserté 10 ans plus tôt et qui est mondialement recherché. Quand il se réfugie de son plein gré au consulat américain du Cap, il est transféré dans la planque locale dont le jeune agent Matt Weston (Ryan Reynolds) est le gardien. Mais quand tout déraille, le quotidien tranquille de Weston se transforme en un double challenge : comprendre ce qui motive Frost et… le garder en vie.

Espinosa a hérité de ce projet qui était très attendu : le scénario figurait dans le Top 10 des scénarios non-produits de 2010. Il s’est donc attaqué à cette histoire en respectant à la lettre les codes du genre « film d’action et d’espionnage ». Armé d’un casting au top, il s’en sort bien et le film se laisse regarder même s’il n’est pas très original.

Pour commencer, ce qui m’a déplu : encore une fois les scènes d’action sont tournées caméra à l’épaule, ça bouge dans tous les sens et je ne m’y fais pas. Je trouve ça un peu facile comme « truc » destiné à montrer l’idée de mouvement. Ici, l’utilisation en est caricaturale : on y a droit pour toutes les scènes de combats et de poursuite en Afrique du Sud alors que les scènes au QG de la CIA aux Etats-Unis sont très cadrées et posées.

Autre point négatif, Ryan Reynolds n’est, selon moi, pas très crédible en agent secret. Même si son rôle est justement celui d’un jeune « bleu » pas encore endurci par le terrain, je trouve qu’il fait un peu mauviette…

A moins que ce ne soit parce qu’il joue aux côtés de Denzel Washington qui, lui, transpire la solidité. Froid et distant, il est capable de dégainer ce petit sourire en coin à tout moment. Il est tout simplement à fond et incarne cet agent en béton avec le talent qu’on lui connaît.

Parce que finalement, pour qu’un film comme celui-ci fonctionne, on ne fait pas dans la dentelle. C’est surtout le rythme qui compte et ici, il est soutenu et bien cadencé. Il faut des scènes d’action qui s’enchainent, des explosions, des courses-poursuites ...
Dans Sécurité Rapprochée, c’est bien ce qu’on trouve. Donc même si le scénario n’est pas révolutionnaire et l’intrigue un peu téléphonée, on s’en fiche. On est scotché à son siège pendant la poursuite en BMW (qui a nécessité 40 cascadeurs), on serre les dents plusieurs fois et on sursaute.
Espinosa a fait son job, sans que Sécurité Rapprochée ne soit un film inoubliable.

La petite anecdote
Denzel Washington est un adepte de la méthode Actor’s Studio : il s’immerge totalement dans son personnage. Si bien que pendant le tournage, en dehors des prises, il appelait Ryan Reynolds « Matt », du nom de son personnage.

Infos pratiques
Sécurité Rapprochée
sorti le 22 février 2012
réalisateur : Daniel Espinosa
avec : Denzel Washington, Ryan Reynolds, Brendan Gleeson, Vera Farmiga

vendredi 24 février 2012

J'ai été voir... Sherlock Holmes: Jeu d'Ombres



Sherlock Holmes, Jeu d’Ombres est sorti il y a déjà quelques semaines et je me suis décidée à aller le voir hier après qu’on m’en ait dit beaucoup de bien.
Il s’agit du deuxième Sherlock Holmes réalisé par Guy Ritchie, à qui on doit également Snatch, et l’excellent Arnaques, Crimes et Botanique. On retrouve le casting du premier (que je n’ai pas vu) : Robert Downey Jr en tête et Jude Law qui joue Watson.

L’histoire de ce second opus démarre quelques mois après le premier.
En 1891, Sherlock Holmes est convaincu que le Professeur Moriarty est à l’origine de nombreux actes de terreur qui conduisent l’Europe au bord de la guerre. Il va donc faire son possible pour l’en empêcher…

 La période historique durant laquelle se passe l’histoire permet à Guy Ritchie de se lâcher et d’utiliser une bonne partie de ses 125 millions de $ de budget en décors et costumes. On est plongés dans un univers visuel très marqué, qui se rapproche plus de la BD que de la reconstitution historique.

Une autre partie importante du budget a dû être consacrée aux effets spéciaux. Le réalisateur use (et abuse) de la caméra HD Phantom qui lui permet ces ralentis et accélérations assez caractéristiques. Dans le film, Sherlock a par exemple la capacité de « pré-visualiser » quand il va se battre avec quelqu’un. Pratique…

Ce qui fait le personnage de Sherlock Holmes, c’est la façon dont il réfléchit, comment il déduit de ses observations minutieuses les comportements de ses ennemis (et de ses amis).
Robert Downey Jr s’en donne à cœur joie pour interpréter le détective. Il en fait une sorte de super-héros en jaquette, complètement décalé et joueur.

Dans Sherlock Holmes, Jeu d’Ombres, l’ennemi parfait est incarné par Jared Harris, prouvant encore une fois que les rôles de méchants sont les plus intéressants. Aussi intelligent que Holmes mais clairement machiavélique, le professeur Moriarty est détestable à souhait.

Les seconds rôles sont drôles et bien tenus : Jude Law est british jusqu’au bout de la moustache et on retrouve Noomi Rapace, la Lisbeth Salander de la version suédoise de Millénium. Quant à Stephen Fry, il est le frère pince-sans-rire de Sherlock Holmes.

Sherlock Holmes, Jeu d’Ombres est excessif et ressemble souvent à un show burlesque, ce qui relègue l’intrigue au second rang. Le réalisateur ne s’est pas embarrassé non plus de la vraisemblance historique si on en croit les spécialistes qui ont listé un grand nombre d’anachronismes.
Malgré certaines lourdeurs et longueurs, l’ensemble est drôle et divertissant et le film plutôt original visuellement.

Enfin pour les amateurs de cinéma vivant dans le sud de Paris, sachez que les salles du Montparnos ont été rénovées et je vous conseille vivement d'aller essayer les fauteuils inclinables (!) super confortables.

La petite anecdote
Le choix de l’actrice pour jouer la gitane Sim a été long. Avant de choisir Noomi Rapace, les actrices Sophie Marceau, Audrey Tautou, Pénélope Cruz, Juliette Binoche, Virginie Ledoyen, Eva Green, Marion Cotillard et Cécile de France ont été considérées pour le rôle.

Infos pratiques
Sherlock Holmes, Jeu d’Ombres
Sorti le 25 janvier 2012 en France
Réalisateur : Guy Ritchie
Avec: Robert Downey Jr., Jude Law, Noomi Rapace, Jared Harris

lundi 20 février 2012

J'ai été voir... Dos au Mur



Mise en garde : si vous souhaitez voir ce film, ne regardez pas la bande-annonce et ne lisez pas de critiques (sauf celle-ci bien sûr…) : elles en disent trop !

Nick Cassidy est prêt à sauter du haut d’un immeuble new-yorkais. Une négociatrice de la police va tenter de l’en dissuader et de comprendre ce qui se passe vraiment. Petit à petit, les morceaux du puzzle se mettent en place.

Le réalisateur Asger Leth a bien intégré une chose pour son premier long métrage : pas la peine de chercher à tout prix à rendre son histoire crédible.
Il y a donc pas mal d’invraisemblances dans Dos au Mur, mais on s’en fiche. Tout simplement parce qu’on sait que c’est du cinéma.

Les critiques mettent Dos au Mur dans la catégorie « thriller » mais je n’irai pas jusque là. Pour moi, il tombe dans la catégorie « film d’action du dimanche soir ». Il en coche les cases principales : une histoire pas trop mal ficelée, des cascades qui font sursauter, des acteurs agréables à regarder (Sam Worthington pour mesdames, Genesis Rodriguez pour messieurs) et une BO pas mal.

Vous l’aurez compris, on n’a pas affaire à un grand film mais on se prend au jeu.

A éviter si vous êtes de mauvaise humeur et que vous n’êtes pas prêt à faire quelques concessions.
Sautez (sic) sur l’occasion si vous cherchez un film d’action qui ne se prend pas trop au sérieux.

La petite anecdote
Sam Worthington est acrophobe, il a une peur extrême du vide. C’est pour affronter cette phobie qu’il a accepté de faire Dos au Mur…  et donc de tourner des scènes à plus de 70m du sol !

Infos pratiques
Dos au Mur
sorti le 15 février 2012 en France
réalisateur : Asger Leth
avec : Sam Worthington, Elizabeth Banks, Jamie Bell, Ed Harris, Genesis Rodriguez


mercredi 15 février 2012

J'ai été voir... La Taupe


A savoir :
1.  Le réalisateur Tomas Alfredson est suédois
2. L’auteur du roman dont est tiré ce film est connu pour la complexité de ses intrigues
Résultat : La Taupe est un film difficile à comprendre. L’histoire est complexe et l’esthétique du film est complexe également…

En 1973, au cœur de la Guerre Froide, George Smiley est limogé du MI6, les services secrets britanniques. Il reprend rapidement du service pour enquêter sur une rumeur qui veut que les Russes aient réussi à implanter une taupe au plus haut niveau du service. Les suspicions et les fausses pistes peuvent commencer…

Pour nous mettre dans l’ambiance des années 70, le réalisateur Tomas Alfredson et son directeur de la photo Hoyte Van Hoytema ont choisi de tamiser la lumière et d’étouffer les bruits. Sauf que c’est toute l’atmosphère qui devient étouffante.
Choisir de raconter une intrigue aussi enchevêtrée en misant sur les silences et les non-dits, c’est demander un vrai effort aux spectateurs. Je ne suis pas contre le fait de réfléchir au cinéma et je pense même que les meilleurs films sont ceux qui demandent de s’impliquer. Mais ici, on est concentré et tendu de peur de rater l’allusion qui permettra d’éclairer tout le reste.

Cette tension (plus que du suspense) est là tout au long du film et on ne peut pas nier qu’Alfredson nous transporte dans sa vision du Cirque (le QG du MI6).
Mais à être trop concentré, on passe à côté des interprétations des acteurs. C’est dommage car on a droit à un casting luxueux.

Gary Oldman tient le rôle principal et il est au cœur du film. Il est d’ailleurs nominé pour l’Oscar cette année. Pour ceux qui ne le reconnaitraient pas à cause de ses lunettes très seventies, sachez que vous l’avez déjà vu dans Harry Potter où il est Sirius Black, le parrain d’Harry, et dans The Dark Knight où il joue le lieutenant policier pote de Batman. Enfin (mais là ça remonte à plus loin) ; il était le méchant Zorb dans Le Cinquième Elément.
Oldman est entouré de seconds rôles tenus haut la main par des acteurs spécialisés dans les seconds rôles : Toby Jones, Mark Strong, John Hurt et… Colin Firth. Tous très bons.
On soulignera la prestation de Benedict Cumberbatch toute en délicatesse. On aura prochainement l’occasion de le revoir puisqu’il joue dan Le Hobbit (sortir en décembre prochain).

J’ai eu la sensation étrange en sortant de La Taupe d’avoir assisté à un bon film mais de ne pas l’avoir compris.
Il y a un travail esthétique certain, et un jeu d’acteurs remarquable. Mais je suis passée à côté de l’intrigue et c’est drôlement frustrant.
Je vais donc courir acheter le roman « Tinker, Tailor, Soldier, Spy » de John LeCarré et me prévoir une rediffusion du film à la sortie du DVD.

La petite anecdote
John LeCarré fait une apparition dans le film, lors de la scène de fête de Noël

Infos pratiques
La Taupe
Sorti le 8 février 2012
réalisateur : Tomas Alfredson
avec : Gary Oldman, Colin Firth, Mark Strong, Toby Jones, Benedict Cumberbatch, John Hurt

mardi 14 février 2012

J'ai été voir... Félins



Si on allait voir un documentaire animalier pour changer un peu ?
Félins est la nouvelle production de DisneyNature, le dernier-né des labels Disney, qui se spécialise dans ce genre.

Au cœur de la savane au Kenya, une lionne et une femelle guépard élèvent leurs petits dans un environnement hostile et sauvage.

Les moyens techniques déployés pour obtenir les images de Félins sont impressionnants. On se retrouve plongé au cœur de la tribu de lions et tous les animaux sont filmés en très gros plan. Une caméra à grande vitesse Phantom HD a été utilisée pour filmer jusqu’à 450 images par seconde !

Je m’attendais à en prendre plein la vue, à voir d’immenses paysages et des courses-poursuites à 100 à l’heure. Je dois dire que j’ai été déçue. Certes, les bébés félins sont craquants et la course du guépard au ralenti est chouette. Mais il n’y a que très peu de plans larges qui permettraient de prendre la mesure de l’environnement quotidien de ces petites bêtes…

Surtout, le récit/scénario qui vient orchestrer les images n’est pas bon. A vouloir mettre en scène un drame épique, les réalisateurs ont trop humanisé les relations entre les animaux. Le résultat n’est tout simplement pas crédible en terme de succession d’événements (un petit guépard qui miaule n’est pas forcément « seul au monde, désespéré de retrouver sa mère » !)

Quant à la voix off, j’ai dû me résoudre à voir Félins en français (il n’est pas diffusé en VO à Paris) et donc à écouter Pascal Elbé au lieu de Samuel L. Jackson qui assure la narration de la version originale. C’est pas terrible.

On peut donc aller voir Félins avec des enfants s’il fait trop froid pour aller au zoo. A condition sans doute de leur expliquer que la vie dans la savane n’est pas aussi romancée…
Mais après tout, on est chez Disney… (qui ressort Le Roi Lion en 3D le 11 avril prochain)

La petite anecdote
Restez jusqu’au générique de fin qui est très rigolo et qui présente les animaux à des postes techniques (la girafe est opérateur grue par exemple…)

Infos pratiques
Félins
sorti le 1er février 2012 en France
réalisateurs : Keith Scholey et Alastair Fothergill

mercredi 8 février 2012

J'ai été voir... Detachment


Les « films de profs », c’est presque un genre à part… Il y a eu Le Cercle des Poètes Disparus, puis plus tard la transposition (ratée) dans un lycée de filles: Le Sourire de Mona Lisa avec Julia Roberts. Dans les années 90, on a Esprits Rebelles avec Michelle Pfeiffer et en BO la chanson 'Gangsta’s Paradise' de Coolio. En France, Entre les Murs de Laurent Cantet a remporté la Palme d’Or à Cannes en 2008 et Isabelle Adjani figurait dans La Journée de la Jupe (adapté d’un fait divers réel si ma mémoire est bonne).
Le cinéma aime se pencher sur le système éducatif et surtout sur ses failles.

Quand le réalisateur d’American History X s’attaque au sujet, on peut donc raisonnablement s’attendre à être bousculé.

Henry Barthes (Adrian Brody) est un professeur remplaçant qui vient passer un mois dans un lycée de la banlieue de New York ou la plupart des élèves (et une partie des profs) ont baissé les bras. Sa route va croiser celle de trois personnages féminins qui vont chambouler les choses : Meredith, une lycéenne mal dans sa peau, Ms Madison, une jeune prof passionnée et Erica une petite prostituée.

Ce qui fait la force du film, c’est qu’au-delà de la critique du système scolaire américain, Tony Kaye pose des questions tout simplement humaines. On est touchés directement par le film, même si on peut se sentir loin de ce lycée new-yorkais.

Le personnage de Barthes cherche à donner à ces gamins ce qu’il n’a pas reçu étant petit : une oreille attentive et un discours rassurant. Mais Barthes n’est pas idéaliste, même pas optimiste au fond… Pour faire son métier, il est obligé de garder ses distances, de se « détacher ». Et c’est bien là tout le sujet : comment aider les autres sans s’impliquer trop pour se protéger soi-même ?

Adrian Brody tient le rôle principal qui lui va comme un gant. Son regard mélancolique et sa silhouette dégingandée collent très bien au personnage. Entre rage contenue et lourd passé, Brody campe un prof complexe et attachant.

A ses côtés, des stars (James Cann, oscarisé pour Le Parrain), des têtes connues (Marcia Gray Harden, Christina Hendricks vue dans Mad Men et Lucy Liu) et des petites nouvelles qu’il faudra suivre (dont Betty Kaye, la propre fille du réalisateur).

Il se dégage de ce film un sentiment d’impuissance assez lourd, comme si même la meilleure volonté du monde ne pouvait pas lutter contre certaines dérives. Mais il y a aussi à mon avis un message qui pousse à aller vers les autres, à ne pas s’enfermer dans sa propre carapace.

Tout n’est pas complètement réussi : la caméra à l’épaule et les gros plans incessants dérangent visuellement et les animations à la craie sur le tableau noir ne sont pas franchement utiles.

Mais ça ne gâche pas le message et l’ambiance générale du film, plutôt déprimant mais très touchant.

La petite anecdote
Trois acteurs oscarisés jouent dans Detachment : Adrian Brody, meilleur acteur pour Le Pianiste, James Caan, meilleur second rôle dans Le Parrain et Marcia Gray Harden, meilleur second rôle féminin pour Pollock d’Ed Harris.

Infos pratiques
Detachment
sorti le 1er février 2012 en France
réalisateur : Tony Kaye
avec : Adrian Brody, James Caan, Marcia Gray Harden, Christina Hendricks, Lucy Liu, Sami Gayle, Betty Kaye




mardi 7 février 2012

J'ai été voir... Another Happy Day



Vous pensiez que l’humour noir était réservé aux anglais ? Eh bien Another Happy Day devrait vous convaincre que les américains savent se défendre dans ce genre.

La famille de Lynn (Ellen Barkin) se réunit pour le mariage de son fils aîné. Ce qui devrait être un jour de fête va très vite déraper quand surgissent les dysfonctionnements de cette famille franchement bancale.

La galerie de personnages que met en scène Sam Levinson est la colonne vertébrale du film : ils sont tous plus dérangés les uns que les autres ! Adultes, ados, personnes âgées : pas d’exception…
Même si on en vient du coup à trouver ça parfois un peu trop gros pour être vrai, on se délecte de leurs excès et de leurs répliques cinglantes.

Ezra Miller confirme ici ce qu’il nous avait déjà montré dans We Need To Talk About Kevin : il se fait une spécialité des rôles d’ados psychotiques. Il incarne ici Eliott, jeune camé qui souffre du syndrome Gilles de La Tourette. On a hâte de la voir jouer autre chose mais il est ici parfaitement dérangeant, fragile et violent.
Ellen Barkin est Lynn, la mère de cette famille de canards boiteux. Elle est omniprésente et son ton larmoyant (et ses lèvres botoxées) sont à la longue un peu pesants. Mais elle porte littéralement cette histoire, avec toutes ses contradictions.

J’ai retrouvé avec plaisir Thomas Haden Church que j’avais beaucoup aimé dans Sideways.
Et les plus grands éclats de rire viennent de la performance de Demi Moore, hilarante en belle-mère hystérique.

On a donc une brochette d’acteurs très en forme qui viennent animer cette réunion de famille haute en couleurs et en émotions.

Dans le fond, l’histoire de Another Happy Day n’est pas très originale et certains trouveront que Sam Levinson donne dans le cliché du cinéma indépendant (le film a d’ailleurs reçu le prix du Meilleur Scénario au festival de Sundance)
Mais c’est rythmé, c’est drôle et si, comme moi, vous rentrez dans l’histoire, c’est un véritable ascenseur émotionnel.

La petite anecdote
Sam Levinson, qui réalise ici son premier long métrage, est le fils de Barry Levinson, réalisateur de Rain Man et Good Morning Vietnam.
Et pour boucler la boucle, Ellen Barkin avait démarré sa carrière au cinéma dans Diner, un film de… Barry Levinson ! (elle ne s’est rendu compte de la filiation Sam/Barry qu’après plusieurs semaines de tournage de Antoher Happy Day)

Infos pratiques
Another Happy Day
Sorti le 1er février 2012 en France
réalisateur : Sam Levinson
avec : Ellen Barkin, Ezra Miller, Kate Bosworth, Demi Moore



jeudi 2 février 2012

J'ai été voir... La Vérité Si Je Mens! 3


Ça faisait 10 ans qu’ils l’annonçaient… on reprend donc les mêmes et on recommence !

On retrouve toute la bande du Sentier, qui a déménagé à Aubervilliers et qui doit faire face à la concurrence venue de Chine. Ils ont des cheveux blancs en plus, un peu de bedaine, ils ont eu des enfants (qui ont grandi) mais au fond, ils n’ont pas changé.

Et c’est bien pour ça qu’on y va, comme pour retrouver une bande de copains qu’on n’a pas vu depuis longtemps.

La raison annoncée (à grands renforts de plateaux télé) pour expliquer l’attente de 10 ans entre le n°2 et le n°3, c’est qu’ils attendaient le bon scénario…
C’est donc un bon scénario ?!... on sent que des efforts ont été faits pour raconter une histoire mais au final, c’est long et cousu de fil blanc. Les rebondissements tarabiscotés sont donc uniquement là pour fournir un décor aux vannes des personnages.

Et surtout (mais là ce n’est pas une surprise), ils en font des tonnes. C’est de la grosse caricature, du bling-bling dans tous les sens et zéro subtilité.
Les femmes qui avaient joué un rôle dans les deux films précédents sont ici relayées au rang de potiches.
Mais on rit finalement de certaines situations poussées à l’extrême et aussi de la complicité entre ces cinq amis.

Car c’est bien ça qui fait tenir le film : l’amitié est non seulement le thème récurrent des Vérité si je mens !, mais c’est aussi celle entre les acteurs qui ont tous rempilé pour ce troisième volet et dont on sent le plaisir qu’ils ont eu à se retrouver.

On ne recommandera donc qu’aux fans d’aller voir La Vérité si je Mens ! 3

La petite anecdote
C’est le retour de Vincent Elbaz. Alors que dans le 2ème volet, le rôle de Dov était tenu par Gad Elmaleh, Elbaz le reprend dans ce n°3.

Infos pratiques
La Vérité Si Je Mens ! 3
sorti le 1er février 2012 en France
réalisateur : Thomas Gilou
avec : Richard Anconina, José Garcia, Bruno Solo, Vincent Elbaz, Gilbert Melki


mercredi 1 février 2012

J'ai été voir... Les Nouveaux Chiens de Garde




C’est la première fois que je parle ici d’un documentaire et je me rends compte que c’est un exercice bien différent de la « critique » d’un film de fiction.

Les Nouveaux Chiens de Garde parle de la place des médias dans la société française.
C’est l’adaptation d’un essai écrit en 1997 par Serge Halimi, directeur du Monde Diplomatique, à la suite des grandes grèves de décembre 1995.

Si on reproche parfois au cinéma de ne pas assez prendre position, c’est loin d’être le cas ici.
Les méchants et les gentils sont aussi bien identifiés que dans un Disney : méchants industriels propriétaires des principaux média contre gentils journalistes indépendants qui ne veulent pas rentrer dans le rang.

Le message est clair : les grands groupes industriels et financiers contrôlent l’information et le pluralisme n’existe pas.
Le film fait preuve d’une certaine pédagogie pour délivrer ce message. Le ton au second-degré peut parfois être arrogant mais certaines démonstrations, images d’archive à la clé, sont édifiantes.
Un bon exemple est la séance qui présente le « mercato » des journalistes vedettes, qui changent d’antenne comme dans un jeu de chaises musicales.

On ressort donc moins bête du cinéma après avoir été voir Les Nouveaux Chiens de Garde, mais surtout, on aiguise son sens critique.
Sens critique qu’on exerce aussi sur le documentaire en question puisqu’il frise parfois la caricature… mais qu’il a le mérite de poser des questions qui dérangent, notamment sur le pouvoir réel du journaliste d’aujourd’hui.

Autre démonstration efficace, celle qui prouve par A+B que les « experts » économistes (toujours les mêmes d’ailleurs) n’ont absolument pas vu venir la crise de 2008, tout occupés qu’ils étaient à vanter les mérites du système des marchés financiers.

Il manque quand même un des acteurs indispensables du monde de l’information d’aujourd’hui : le documentaire ne mentionne pas du tout Internet et son potentiel rôle de contre-pouvoir.

Les Nouveaux Chiens de Garde est donc un film résolument militant et argumente sa thèse de façon efficace, même si c’est parfois avec de gros sabots.

Finalement, la place d’un tel film n’est peut-être pas dans une salle de cinéma mais sur un écran de télé. Je doute cependant qu’aucune chaîne ne prenne l’initiative de le diffuser…

La petite anecdote
Pour ceux que ça intéresse, voici un lien qui recense les débats organisés après la projection du film : http://www.acrimed.org/article1667.html

Infos pratiques
Les Nouveaux Chiens de Garde
Sorti le 11 janvier 2012 en France
réalisateurs : Gilles Balbastre et Yannick Kergoat