mardi 23 février 2016

Demain


Les documentaires sont assez rares sur grand écran aujourd'hui. Demain mérite donc le détour, ne serait-ce que pour changer un peu de ce qu'on voit habituellement au cinéma.

Ça commence mal: par la publication d'une étude annonçant la possibilité de disparition de l'humanité d'ici 2100. 
Mais ça se poursuit de façon positive: par des dizaines d'initiatives à l'échelle humaine qui changent le monde de ceux qui les mettent en place.

Mettre bout à bout des initiatives positives et concrètes pour montrer qu'il est possible de changer les choses, demain. Voilà le projet de Cyril Dion et Mélanie Laurent. C'est cet état d'esprit constructif qu'ils ont voulu insuffler à leur film. Plutôt que de se lamenter sur une potentielle catastrophe, ils préfèrent montrer de petits projets qui marchent.

Agriculture, énergie, économie, démocratie, éducation: ces 5 thématiques sont abordées successivement et nous embarquent aux quatre coins du monde. 

Cyril Dion a été impliqué dans le Mouvement Colibris de Pierre Rabhi (qu'on voit également dans le film) et le film défend clairement une position. Pas de place ici pour la remise en question de ces initiatives: les détracteurs n'ont pas leur mot à dire. Mais libre à chacun de faire fonctionner son libre-arbitre et d'aller chercher des contre-exemples pour enrichir le débat. 

Présenté à l'ouverture de la COP 21, Demain continue de rencontrer un franc succès en salle: plus de 500 000 spectateurs à ce jour.

En tant qu'objet cinématographique, pas grand chose à noter: on se balade avec nos réalisateurs. Les sujets sont intéressants et le montage efficace si bien qu'on ne voit pas passer le temps.

Demain fait du bien au milieu de l'hiver tout gris. Il ne présente pas une recette miracle mais dresse le portrait d'idées d'aujourd'hui. On peut être en désaccord avec les théories présentées, ou considérer que la solution ne se situe pas au niveau individuel. Il n'empêche que 2 heures pleines d'énergie positive, ça ne se refuse pas. Chacun répondra à sa façon à la question qui se pose à la fin: et moi, demain, je fais quoi?

La petite anecdote:
Pour financer le projet, une campagne de crowdfunding a permis de réunir 450 000€ (contre 200 000 demandés au départ) grâce à la participation de 10 266 personnes.

Note:
3.5/5

Infos pratiques:
Demain
sorti le 2 décembre 2015 en France
réalisateurs: Mélanie Laurent et Cyril Dion




jeudi 11 février 2016

Deadpool



Gore, sexe et vannes trash s'invitent au pays des super-héros. Deadpool débarque sur grand écran et ne passe pas inaperçu.

Atteint d'un cancer en phase terminale, Wade Wilson accepte de subir une mutation génétique qui accélère sa capacité de guérison. L'expérience le laisse défiguré mais ne lui fait pas perdre son sens de l'humour.

Deadpool est un personnage à part dans l'univers Marvel. En un mot, il est complètement déjanté. N'ayant jamais accepté de rejoindre les X-Men, il agit en mercenaire et croise régulièrement la route d'autres mutants.
Ce qui a sans doute poussé les studios à lui consacrer un film est sa fanbase. Deadpool est un phénomène sur Internet et dans le monde des comics. En effet, il brise souvent le 4ème mur et s'adresse directement au lecteur / spectateur. Qui noue une relation particulière avec lui. 

Le projet a été confié au réalisateur Tim Miller, expert des effets spéciaux, qui signe ici son premier long métrage. 
La promo du film a été spectaculaire (et très drôle) et a donné le ton: affiches clin d’œil et vidéos spéciales pour Thanksgiving, Noël, Australia Day : Deadpool fait son Deadpool. Et si vous ne le connaissiez pas, vous voilà prévenus! 

Deadpool est sans complexe et joue à fond la carte de l'humour qui est - vous l'aurez compris - son atout principal (unique?). Un humour scato, potache, gras et... efficace. 
Le second degré est omniprésent, tout comme les références aux comics et aux autres films Marvel.
Je recommande vivement la VO car les traductions perdront forcément de leur saveur.  
La bande-son est réussie avec des clins d'oeils (Wham!) et des sons qui font remuer dans son siège (Shoop).

Le scénario quant à lui est assez banal: pas de révélation à ce niveau. On garde le côté gentils vs méchants du film de super-héros, même si le "gentil" coupe des têtes au sabre. Miller reste dans les rails du genre, même quand il nous perd un peu dans des flash-backs destinés à nous expliquer le passé de Wilson.
Les scènes d'actions sont, décomplexées et assez jubilatoires, même si assez conventionnelles elles aussi. L'efficacité cinématographique est à donc revoir (on est loin d'un X-Men) et il n'y a pas de message ou de morale cachée.

C'est Ryan Reynolds qui cache sa belle gueule sous le masque rouge. Il avait déjà enfilé un costume (vert) de super-héros pour Green Lantern qui avait été un échec cuisant. Il semble ici tout à fait à l'aise dans le côté arrogant et sans limite de son héros.
Côté casting, on notera le rôle sur-mesure de Angel Dust pour Gina Carano (championne de Mixed Martial Arts) et le joli minois de Morena Baccarin (vue dans la série Homeland). 

Oreilles sensibles s'abstenir: le taux d'obscénités est au-delà de la normale. Le gore est également visuel et mérite un petit avertissement. Si vous adhérez au style, vous rirez (comme moi et la grande majorité de la salle hier soir). Sachez que le film est R-Rated aux Etats-Unis soit déconseillé aux moins de 17 ans.

Entre un (trop) grand respect des conventions du style et l'irrévérence de son héros, Deadpool remplit le contrat de nous faire passer un bon moment mais ne restera pas dans les mémoires. 

La petite anecdote
Deadpool est fan de... Hello Kitty. C'est d'ailleurs le seul compte auquel est abonné le Twitter officiel du film: https://twitter.com/deadpoolmovie

Note:
3/5


Infos pratiques:
Deadpool
sorti le 10 février 2016 en France
réalisateur: Tim Miller
Avec: Ryan Reynolds, Morena Boccarin, Gina Carano, Ed Skrein





mercredi 10 février 2016

Spotlight


Longtemps sur la "blacklist" d'Hollywood qui recense les scénari à potentiel mais sans producteur, Spotlight sort en ce début d'année et compte d'ores et déjà 6 nominations aux Oscars - dont meilleur réalisateur et meilleur film.

Le Boston Globe est doté d'une équipe de journalistes d'investigation. En 2001, ces quatre reporters enquêtent sur des soupçons d'abus sexuels sur mineurs par des prêtres de l'Eglise catholique.

Les films d'enquête journalistique sont presque un genre à part entière. Spotlight est ainsi un digne héritier des Hommes du Président qui relatait le scandale du Watergate.
Le propre de ces histoires est qu'on en connaît déjà l'issue. Ce qui n'enlève rien à notre plaisir de suivre l'évolution de l'investigation. 
Les personnages sont ici des bosseurs, ils retournent toutes les pierres pour être sûrs de tenir la vérité. En ce sens, Spotlight est une ode au journalisme et à l'indépendance de la presse, qui fait espérer que ces équipes existent toujours, avec les moyens pour travailler dans de bonnes conditions.

La subtilité tient ici à la relation que chacun des personnages a avec l'Eglise. Ils gèrent chacun à leur manière l'ampleur du scandale, leur dégoût et la violation de leur confiance en cette institution.

Spotlight est un film très classique dans sa mise en scène. Tout est au service du scénario et des dialogues millimétrés. Pas de chichis dans les décors et les costumes, qui collent au plus près à la réalité. Les vrais journalistes du Globe ont par ailleurs contribué à ce que le rendu corresponde à ce qu'ils ont connu. Chacun a collaboré avec l'acteur qui allait l’interpréter et ils ont été troublés du résultat, comme s'ils étaient "devant un miroir, sans pouvoir maîtriser le reflet".

L'affiche aligne de grand noms dont aucun ne tire la couverture à lui. Les interprétations sont sérieuses et efficaces. Mark Ruffalo (Foxcatcher, New York Melody) et Rachel McAdams (The Notebook, Il Était Temps) sont tous deux nominés aux Oscars pour leurs prestations.

Le résultat est sobre et précis, maîtrisé. Pas besoin de superlatifs pour sonner juste, l'histoire est suffisante et les interprètes parfaitement convaincants. 
Le sujet méritait respect et minutie et le réalisateur Tom McCarthy remplit le contrat. 
A voir.

La petite anecdote:
Cette enquête a reçu le Prix Pulitzer. Pour en savoir plus sur ce prix, c'est ici.

Note:
4/5

Infos pratiques:
Spotlight
sorti le 27 janvier 2016 en France
réalisateur: Tom McCarthy
avec: Rachel McAdams, Michael Keaton, Mark Ruffalo, Stanley Tucci




mardi 2 février 2016

Danish Girl


Nominé deux fois aux prochains Oscars et présenté lors de la dernière Mostra de Venise, le nouveau film du réalisateur Tom Hooper (Le Discours d'un Roi) a de quoi séduire.

Au début du XXème siècle, le peintre danois Einar Wegener découvre que sa vraie personnalité est féminine. Il va se battre, accompagné de son épouse, pour pouvoir changer se sexe.

Inspiré de faits réels mais adapté d'un roman américain (Danish Girl de David Ebershoff), ce film signe l'entrée de la transexualité dans le cinéma le plus commercial. Le sujet avait déjà été évoqué dans d'autres films (Laurence Anyways de Xavier Dolan par exemple) mais l'ampleur de celui-ci est autre.

En effet, Danish Girl est destiné au grand public et son réalisateur a à coeur de ne choquer personne. Cette angoisse de déplaire se sent tout au long du film dans une atmosphère un peu trop ampoulée.
La mise en scène très académique fait la part belle aux magnifiques costumes et décors: Copenhague et Paris à la fin des années 20, un monde d'artistes et de couleurs, des paysages méticuleusement éclairés.

Danish Girl est un film sensible.
Par son sujet tout d"bord: on parle ici d'une des premières opérations de changement de sexe. 
Sensible également par ses personnages délicats et fragiles. L'histoire d'Einar/Lili est dramatique et on ressort de la séance avec un grand sentiment de tristesse pour cette personne qui a sans doute vécu toute sa vie malheureuse.

Danish Girl est aussi le récit d'une histoire d'amour hors du commun entre Einar et sa femme Gerda, peintre elle aussi. Elle va choisir de soutenir et d'épauler son mari dans sa démarche. A noter que le récit de cette relation est semble-t-il assez éloigné de la réalité.

Ce couple est interprété par Eddie Redmayne (récompensé en 2015 par l'Oscar du Meilleur Acteur pour La Merveilleuse Histoire du Temps et nominé à nouveau cette année pour ce rôle) d'une part. Le méticuleux travail de maquillage et d'éclairage vient compléter des attitudes très travaillées qui le rendent effectivement féminin. Certains ont trouvé qu'il frôlait d'ailleurs avec le cabotinage.
Gerda Wegener est jouée par Alicia Vikander (vue récemment dans Agents très spéciaux: code U.N.C.L.E et aussi dans Royal Affair) avec beaucoup de sincérité. Elle a quant à elle toutes ses chances dans la course à l'Oscar du meilleur second rôle féminin.

Le sujet potentiellement sulfureux est étouffé dans un académisme un peu ampoulé. Danish Girl est un beau film, triste mais pas aussi dérageant qu'on aurait pu l'espérer.

La petite anecdote:
Les premières opérations de changement de sexe ont vraisemblablement eu lieu dans les années 20, notamment en Allemagne. Cependant, les archives ont été détruites par les nazis en 1933 et il n'y a donc pas de trace officielle de ces interventions pionnières.

Note:
3/5

Infos pratiques:
Danish Girl
sorti le 20 janvier 2016 en France
réalisateur: Tom Hooper
avec: Eddie Redmayne, Alicia Vikander, Matthias Schoenaert, Ben Whishaw