lundi 19 mars 2012

J'ai été voir... Entre les Bras


Dans ce documentaire, Paul Lacoste nous plonge dans l’univers de la famille Bras, chez qui on est chef étoilé de génération en génération.
Michel Bras, le père, décide en 2009 de laisser progressivement sa place à son fils Sébastien à la tête de son restaurant 3 étoiles (19.5/20). On les accompagne pendant un an, au fil des saisons…

Les films ou les émissions consacrés à la cuisine vont généralement à 100 à l’heure et tout le monde court dans tous les sens.
Ici, le temps semble suspendu et les chefs prennent le temps d’aller regarder le soleil se lever. Lacoste ne filme pas pendant les services mais plutôt avant : au marché, au jardin, pendant l’explication des menus. Surtout, il filme dehors, dans la nature de l’Aubrac qui est la source d’inspiration principale de ces cuisiniers-génies.

On est d’ailleurs à un niveau de cuisine qui s’apparente plus à de la création artistique qu’à autre chose. Les plats sont imaginés, dessinés, travaillés puis déconstruits… comme des œuvres d’art.

Les Bras, père et fils, ne sont pas des bavards. C’est donc plus par les regards et les silences qu’on devine ce qui se passe entre eux, entre admiration et volonté de s’affranchir.
Les silences sont nombreux et parfois un peu pesants. Par ailleurs, la musique qui accompagne le film donne une ambiance inutilement déprimante.

Les thèmes abordés sont profonds : la filiation et l’héritage, le poids du destin, etc… on assiste donc à un film qui a pour décor la cuisine mais qui est plus large que ça.

Enfin, on se régale de certaines scènes : le dressage du « gargouillou », spécialité de Michel Bras avec 40 légumes et herbes ; et surtout la fête des vendanges à Gaillac avec des invités prestigieux (4 personnes, 12 étoiles).

L’adjectif qui caractérise selon moi Entre les Bras – la cuisine en héritage est « pudique ». Ce qu’il gagne en intimité, le film le perd en dynamisme. Comme un plat agréable mais qui ne vous laisse pas un souvenir indélébile…

La petite anecdote
Les tarifs du Suquet, le restaurant des Bras à Laguiole. Le menu « Aubrac » est à 120€, le menu « Légumes » à 145€ et le menu « Balade » est à 191€.
Le restaurant ouvre le 6 avril.

Infos pratiques
Entre les Bras – la cuisine en héritage
Sorti le 14 mars 2012 en France
Réalisateur : Paul Lacoste



samedi 17 mars 2012

J'ai été voir... Cloclo



C’est la grande mode des biopics, ces films-biographies qui retracent la vie d’artistes ou de personnages célèbres : récemment, J. Edgar ou La Dame de Fer, dans deux semaines, My Week with Marilyn, il y a quelques temps La Môme, Gainsbourg ou Ray… et tant d’autres.
On aime se pencher côté coulisses et connaître les petits secrets des stars. Côté cinéma, on aime pouvoir évaluer la performance des acteurs en les comparant aux « vrais » personnages auxquels ils sont sensés ressembler.
Pas étonnant que Claude François ait droit à son biopic, lui qui a déchaîné les passions de son vivant et qui reste une star incontournable aujourd’hui (il a vendu plus de 63 millions de disques à ce jour).

Cloclo raconte toute la vie de Claude François, de sa naissance en Egypte à sa mort à la veille de ses 40 ans.

Première particularité du film, l’histoire est racontée de manière chronologique. C’est presque une originalité tant les biopics usent et abusent d’habitude du flash-back. Ici on assiste à l’évolution du personnage et des époques qu’il traverse.
Le travail de reconstitution des décors et des costumes est très minutieux et on est rapidement immergé.

Autre point positif, l’acteur principal Jérémie Renier ressemble de façon bluffante à l’original. Outre la ressemblance physique « naturelle », Renier a travaillé pendant 5 mois avec des coaches (voix, danse, postures) pour arriver à ce mimétisme. Ajoutez un très bon maquillage (ce qui est assez rare pour être noté) et une façon de le filmer sous les meilleurs angles, on y croit vraiment.
Le travail d’imitation est moins réussi pour Benoît Magimel qui interprète Paul Lederman, le premier producteur de Cloclo. On est gêné par le maquillage et par un accent juif trop joué et trop forcé.

Les autres seconds rôles sont réussis, surtout Chouffa (Monica Scattini), la mère du chanteur. Tous ces personnages secondaires permettent de mettre en lumière certains aspects de la personnalité ou de la vie de Claude François, de façon plutôt subtile.

Si vous êtes fan de Cloclo, si vous vous êtes documentés sur sa vie ou si vous avez vécu à cette époque et que vos souvenirs sont clairs, alors vous serez moins surpris que moi par tout ce qui est arrivé à cet homme. Cloclo revient sur sa vie, ses aventures amoureuses, sa famille, sa carrière de chanteur et toutes ses autres carrières (patron de presse, de maison de disque…). Bref, bien plus que le chanteur à minettes en costume à paillettes…

Au-delà des faits, souvent surprenants, Cloclo nous montre la part d’ombre de Claude François : monomaniaque, obsessionnel et control-freak, c’était un patron tyrannique et un amant possessif et jaloux.
D’ailleurs les deux fils du chanteur, qui sont producteurs exécutifs du film, ont semble-t-il pesé pour que cet aspect sombre de leur père ne soit pas trop mise au grand jour.

Quand le réalisateur tente d’expliquer d’où viennent ces traits de caractère, on tombe presque dans la psychanalyse de comptoir (l’image du père, la mama italienne castratrice, etc).
Le film fait presque 2h30 et c’est parfois un peu long. Mais il est plutôt bien rythmé, les différentes étapes de la vie et de la carrière s’enchaînent et on est happés dans le tourbillon.

Certaines scènes sont même géniales et nous permettent de vivre la folie Cloclo de l’intérieur. Avez-vous déjà imaginé une horde de jeunes filles hurlant qu’elles vous aiment dès que vous sortez de chez vous ?

Enfin au niveau musical, qu’on aime ou pas, on connaît tous ses chansons et on se prend plus d’une fois à taper du pied ou à claquer des doigts devant le film. Surtout, on se rend compte comment Claude François transformait en chansons ce qui lui arrivait dans la vie.

Je recommande Cloclo non seulement aux fans des yéyés et aux nostalgiques des pattes d’eph et des cols pelle à tarte, mais aussi à ceux qui veulent en savoir plus sur le mythe de cet homme qui est effectivement devenu l’image qu’il avait créé, dans le moindre détail…

La petite anecdote
En me renseignant sur Cloclo, j’ai découvert un mot, mentionné dans à peu près tous les articles consacrés au film : hagiographie. C’est un texte racontant la vie des saints.

Infos pratiques
Cloclo
Sorti le 14 mars 2012 en France
Réalisateur : Florent Emilio-Siri
Avec : Jérémie Renier, Benoît Magimel, Benoît Scattini

lundi 12 mars 2012

J'ai été voir... John Carter


Quand Avatar rencontre Gladiator au pays de Star Wars, ça donne… John Carter, dernier-né des studios Disney.
On pourrait penser qu’il s’agit d’une récente création qui surfe sur la vague science-fiction… mais John Carter a 100 ans cette année ! C’est le héros de la saga « Le Cycle de Barsoom » écrite par Edgar Rice Burroughs (qui a également créé Tarzan).
Le film est dans les cartons depuis 79 ans puisqu’un premier projet datait de 1931. S’il avait abouti, ce John Carter aurait été le premier film d’animation, avant le Blanche Neige de Walt Disney en 1937.

John Carter était soldat pendant la guerre de Sécession, il vit aux Etats-Unis à la fin du XIXème siècle. Il est mystérieusement transporté sur Mars où il se retrouve rapidement – et bien malgré lui – impliqué dans la guerre qui oppose deux cités. Son chemin va alors croiser celui du peuple thark et de la princesse Dejah…

Andrew Stanton a déjà de beaux succès à son actif, notamment Le Monde de Némo et Wall-E. Il signe ici son premier film en prises de vue réelles et s’attaque donc à un grand classique de la science-fiction.

Disney n’a pas imposé d’acteurs stars pour interpréter les rôles principaux. Taylor Kitsch prête ses muscles et sa tignasse au héros alors que la princesse Dejah est incarnée par Lynn Collins. Les acteurs plus connus comme William Defoe sont méconnaissables puisqu’ils jouent en motion capture (prise de vue modifiée par ordinateur) les Tharks, ces grands bonshommes verts à six pattes.

Pour apprécier John Carter, plusieurs options s’offrent à vous (elles peuvent se combiner) :
soit vous êtes fan des romans de Burroughs et vous attendiez ça depuis longtemps ;
soit vous êtes armé d’un solide sens de l’humour et surtout d’un second degré à toute épreuve ;
soit vous souhaitez voir un film qui ne demande pas trop de réflexion et qui en met plein la vue.

On pourra reprocher à John Carter d’être un film plein de clichés et de frôler de très près la caricature. Mais il y a une volonté de bien faire les choses qui rend le film divertissant, même quand il va trop loin. Et certaines trouvailles « made in Disney » sont vraiment drôles (spéciale dédicace à Woola).

L’œuvre originale de Burroughs a influencé tellement de romans et de films par la suite qu’on a une forte impression de déjà-vu. La planète Barsoom (Mars) de John Carter ressemble beaucoup à celle de Tatooine dans Star Wars par exemple et Masai Shang a un faux air de personnage de Star Trek. Ce n’est pas désagréable en fait, on a l’impression de retrouver un univers que l’on a déjà visité.

Car il est bien question d’univers dans John Carter. Au fond, l’histoire est secondaire car ce qui importe, c’est le monde dans lequel elle a lieu. Comme pour Star Wars ou (dans un autre genre) Le Seigneur des Anneaux, on est transportés dans un univers créé de toute pièce, peuplé par des êtres qui parlent une langue imaginée par l’auteur…

J’ai apprécié John Carter parce que c’est un film soigné et parce qu’il ne peut pas y avoir d’erreur sur la marchandise. Regardez la bande-annonce : on nous présente un film de science-fiction avec de gros effets spéciaux, des scènes d’action impressionnantes et une histoire d’amour cliché à souhait. Eh bien, pas de surprise, c’est exactement ce que vous allez voir !

La petite anecdote
Le projet s’est un temps intitulé « La Princesse de Mars », comme le roman dont il est tiré. Estimant qu’on risquait de faire fuir les garçons, le titre a été changé pour « John Carter of Mars ». Cette fois, c’est les filles qui risquaient de ne pas venir. On a donc gardé l’essentiel : John Carter.

Infos pratiques
John Carter
sorti le 7 mars 2012 en France
réalisateur : Andrew Stanton
avec : Taylor Kitsch, Lynn Collins, Mark Strong, William Dafoe

mercredi 7 mars 2012

J'ai été voir... Extrêmement Fort et Incroyablement Près



Dans la catégorie « mélo » je voudrais… l’adaptation de best-seller ! Voici Extrêmement Fort et Incroyablement Près, film de Stephen Daldry (réalisateur de Billy Elliot, The Hours et The Reader) tiré du roman de Jonathan Safran Foer.

Le thème du film est dramatique en soi : un petit garçon un peu lunaire ayant perdu son père dans les attentats du 11 septembre poursuit une quête à travers New York pour ne pas l’oublier.

Le roman de Foer, publié en 2005, est l’une des premières œuvres de fiction à traiter des événements du World Trade Center. J’avais beaucoup aimé le livre et sa façon de présenter cette histoire triste de manière très décalée. Oskar est en effet un petit garçon différent, très intelligent et sans doute un peu autiste. Ce qui crée des situations cocasses. Mais ce ton humoristique ne se retrouve que très rarement au cours du film. On reste donc plutôt sur les éléments tragiques, et il y en a !

Le résultat final donne un film centré sur la douleur de perdre un être cher dans un événement aussi incompréhensible que le 11 septembre. Alors que le message aurait pu porter sur comment construire et apprendre d’un tel drame.

On a même l’impression que le réalisateur s’englue dans les scènes destinées à nous faire verser une larme. La musique et le montage accompagnent cette sensation : tout ça manque cruellement de subtilité.

Point positif, les prises de vue de New York sont très chouettes et le film aborde la diversité que renferme cette ville (le fait que j’y aille pour la 1ère fois dans quelques semaines n’est sans doute pas étranger à cet enthousiasme…)

Le personnage d’Oskar Schell a des côtés énervants comme souvent les enfants au cinéma. Mais en général, il m’a fait penser à un Forrest Gump jeune, dans les années 2000. Impression évidemment renforcée par le fait que Tom Hanks joue le papa disparu du jeune Oskar.

Même si Stephen Daldry n’a pas voulu analyser le 11 septembre et ce qui s’en est suivi dans Extrêmement Fort et Incroyablement Près, il véhicule un message plutôt étrange (« tout le monde est gentil et aide le pauvre petit Oskar ») qui sonne faux.

Extrêmement Fort et Incroyablement Près fera pleurer dans les chaumières mais là où le roman était pétillant et original, le film est dramatique et lourd. On pouvait espérer plus (plus drôle, plus léger, plus vrai) et c’est dommage.

La petite anecdote
Max Von Sydow a été nominé aux Oscars pour son rôle dans Extrêmement Fort et Incroyablement Près. A croire que l’édition 2012 était un hommage au cinéma muet (cf. The Artist) puisqu’il ne prononce pas un mot du film !

Infos pratiques
Extrêmement Fort et Incroyablement Près
sorti le 29 février 2012 en France
réalisateur : Stephen Daldry
avec : Tom Hanks, Thomas Horn, Sandra Bullock, Max Von Sydow

lundi 5 mars 2012

J'ai été voir... Les Infidèles



Gilles Lellouche et Jean Dujardin sont actuellement dans une position rêvée : ils pourraient faire à peu près n’importe quoi et seraient quand même assurés du succès. Du coup, ils ont décidé de faire un film ensemble.

Les Infidèles est un film à sketches : 7 réalisateurs se succèdent pour 7 courts-métrages qui traitent du thème de l’infidélité, ou plus précisément de l’infidélité au masculin.

Lellouche et Dujardin ont porté le projet (ils sont coscénaristes, coréalisateurs et interprètes principaux) et ils ont demandé à tous leurs amis de cinéma d’y participer. Devant la caméra on retrouve Alexandra Lamy, Guillaume Canet, Isabelle Nanty, Manu Payet, et d’autres. Derrière la caméra, Michel Hazanavicius (The Artist et les OSS 117), Fred Cavayé (A Bout Portant), Eric Lartigau (L’Homme qui voulait vivre sa vie, Prête-moi ta main). Du beau monde du cinéma français qui marche si bien en ce moment…

Le film avait fait parler de lui avant sa sortie avec une polémique concernant des affiches un peu trop évocatrices. On pouvait craindre le pire…
C’est donc finalement une bonne surprise puisque le niveau d’humour n’est pas constamment sous la ceinture et qu’il y a même quelques moments émouvants.
Certes, on n’échappe pas aux blagues potaches et le film va parfois un peu loin. Mais ces moments sont contrebalancés par d’autres séquences plus dramatiques.

Certains penseront sans doute que Lellouche et Dujardin trouvent des prétextes à l’infidélité, voire qu’ils l’excusent presque parfois. Je crois surtout qu’ils ont voulu aborder le sujet sous différents angles pour en montrer la complexité.

La forme même du film lui donne un certain rythme : pas le temps de s’ennuyer puisque chaque histoire dure 10-15 minutes maximum. Pas le temps d’approfondir non plus…

Si on s’arrête au côté divertissant, Dujardin joue à fond la carte « beauf ironique » qui a fait sa marque de fabrique. Les seconds rôles sont nombreux et réussis. Je soulignerai seulement les prestations de Sandrine Kiberlain et Manu Payet qui sont irrésistibles. Quant au brushing de Guillaume Canet, il faut le voir pour le croire.

On rigole devant ces Infidèles, souvent d’un rire un peu gras. Mais on est aussi touchés ce qui donne un ensemble plutôt réussi.

La petite anecdote
Surprise au générique : le film est sponsorisé par gleeden.com, site de rencontre qui lui aussi avait suscité une polémique avec sa campagne d’affichage. Il se présente en effet comme « le 1er site de rencontre dédié aux personnes mariées »…

Infos pratiques
Les Infidèles
sorti le 29 février 2012 en France
réalisateurs : Jean Dujardin, Gilles Lellouche, Michel Hazanavicius, Fred Cavayé, Eric Lartigau, Emmanuelle Bercot, Alexandre Courtès
avec : Jean Dujardin, Gilles Lellouche, Alexandra Lamy, Géraldine Nakache, Isabelle Nanty, Sandrine Kiberlain, Manu Payet, Guillaume Canet