lundi 17 septembre 2012

J'ai été voir... Killer Joe


Afin de se procurer les $6000 qu'il doit, Chris, petit dealeur minable, décide de faire assassiner sa mère pour récupérer son assurance-vie. Il fait appel à Killer Joe, flic le jour et tueur à gage la nuit. Pour garantir le paiement, Joe prend une caution: Dottie, la soeur de Chris.

Killer Joe, recette d'un film complètement déjanté, sauvage et électrique.

INGRÉDIENTS:
- un réalisateur de 80 ans, William Friedkin, qui a signé entre autres L'Exorciste et French Connection, qui a été brièvement marié à Jeanne Moreau et qui n'a visiblement rien perdu de son énergie et de son grain de folie.

- une pièce de théâtre de Tracy Letts adaptée par l'auteur lui-même (qui, au passage, a reçu le prix Pulizer en 2008) et qui signe un scénario précis et des personnages fouillés.

- un casting idéal, mené par Matthew McConaughey qui tient sans doute le plus grand rôle de sa carrière: un charmeur terrifiant et pervers, au magnétisme animal et au sadisme fascinant.

RECETTE:
1. Versez les ingrédients dans un Texas bien pourri, si propice à l'émergence de familles dysfonctionnelles.

2. Servez des scènes à la violence brute, filmées plein cadre sans chercher à ne rien cacher. Ne vous inquiétez pas si vos convives rient jaune ou nerveusement: c'est sans doute dans le but de se débarrasser du malaise qui envahit parfois à la vision de ces moments.

3. Assaisonnez d'un humour noir qui range Killer Joe dans la même catégorie que les films (réussis) des frères Coen ou certains Tarantino.

4. Saupoudrez des performances d'un groupe d'acteurs parfaits pour leurs rôles. Emile Hirsh (vu dans Into The Wild et Milk) confirme son gros potentiel, la gueule cassée de Thomas Haden Church va comme un gant pour le paternel looser. Et Juno Temple (aperçue dans The Dark Knight Rises) prête son visage de porcelaine à Dottie, personnage enfantin et angélique aux multiples facettes.

5. Servez le tout avec une réalisation très maîtrisée, sans chichi et une esthétique trash détaillée.

6. Secouez bien fort vos invités jusqu'à la scène finale, apogée extrême d'un film qui flirte sans cesse avec les limites de la morale.

AVERTISSEMENT:
La rédaction de cette recette décline toute responsabilité en cas de nausée pendant et/ou après la projection: entre scènes crues à la symbolique dérangeante et explosion de violence, mieux vaut avoir l'estomac bien accroché pour déguster Killer Joe et l'apprécier à sa juste valeur.

La petite anecdote
Matthew MacConaughey a la côte à Hollywood. Présent actuellement à l'affiche de Magic Mike et de Killer Joe, il a également présenté deux films au dernier festival de Cannes: Paperboy avec Nicole Kidman et Zac Efron et Mud, le nouveau Jeff Nichols (Take Shelter).

Infos pratiques
Killer Joe
sorti le 5 septembre 2012 en France
réalisateur: William Friedkin
avec: Matthew McConaughey, Emile Hirsh, Juno Temple, Thomas Haden Church, Gena Gershon
bande-annonce: http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19354978&cfilm=185536.html 

jeudi 13 septembre 2012

J'ai été voir... Des Hommes Sans Loi


La sélection du film Des Hommes Sans Loi en compétition officielle du dernier festival de Cannes en avait surpris plus d'un. Et même si le réalisateur John Hillcoat (La Route) est reparti bredouille, le film avait fait bonne impression.

Au début des années 30 aux Etats-Unis, la Prohibition a transformé le compté de Franklin en Virginie en un haut lieu de production d'alcool de contre-bande. Les trois frères Bondurant gèrent leur trafic en famille jusqu'à ce qu'un agent fédéral corrompu tente de leur imposer sa propre loi.

A mi-chemin entre le western et le film de gangster, Des Hommes Sans Loi est globalement une réussite. On s'accroche avec plaisir aux membres de cette famille plus à cheval sur leur honneur que sur la légalité. Ils sont par ailleurs entourés de personnages hauts en couleurs qui les mettent agréablement en valeur.

Hillcoat a choisi de raconter cette histoire inspirée de faits réels et tirée du roman The Wettest County In The World, écrit par un des descendants de la vraie famille Bondurant. Nick Cave, musicien avec lequel il avait déjà travaillé sur The Proposition, signe ici le scénario ET la bande son, créant une ambiance musicale parfaitement adaptée et intégrée à l'histoire.
Le décor est par ailleurs très bien planté et les détails dans les costumes et les décors sont assez bluffant. 

La réalisation est très classique et on retrouve les codes et les clichés des westerns américains (nature, gueules cassées et feux de camp).
La violence des films de gangsters a également sa place et certaines scènes sans fard m'ont poussé à détourner le regard.
Des Hommes Sans Loi parle de la famille, et en particulier des liens qui unissent ces trois frères aux caractères et aux ambitions très différents. Par cet angle, on pense parfois à un film sur la mafia.
Enfin, Des Hommes Sans Loi est un film d'hommes. Les personnages féminins (interprétés par Jessica Chastain et Mia Wasikowska, jolies et sensibles au milieu de ce monde de brutes) ne sont qu'à peine effleurés, et servent de faire-valoir à ces messieurs.

2011-2012, années Tom Hardy ( Warrior, La Taupe, The Dark Knight Rises) ? Il livre ici une performance massive en interprétant Forrest Bondurant, l'aîné et chef de la famille. Tout en puissance retenue et en silences, l'acteur confirme son potentiel de brute au coeur tendre. Il a d'ailleurs confié en interview que la virilité de son personnage vient paradoxalement, selon lui, du fait qu'il est un "matriarche".

Sous l'aile de la Maman Ours - Tom Hardy on trouve Shia LaBeouf en petit dernier de la fratrie, pas très costaud et rêvant de grandeur. Il est subtil et tout en nuances et c'est plutôt une bonne surprise (je partais avec un a priori plutôt négatif depuis le navet Eagle Eye et les Transformers).

Pour incarner le méchant face à ces péquenauds trafiquants d'alcool, Hillcoat a fait appel à Guy Pearce. Il campe un flic pourri, inquiétant et sadique, aussi répugnant à l'intérieur qu'il est impeccable en surface.

Des Hommes Sans Loi ne sort pas des sentiers battus.
Le final est en dessous de ce qu'il aurait pu être, certains personnages auraient mérité plus de place (notamment Floyd Banner, interprété par Gary Oldman)... On pense à Public Enemies de Michael Mann ou aux Sentiers de la Perdition  de Sam Mendes
Hillcoat n'a pas souhaité ré-interpréter un genre, il voulu s'inscrire dans une tradition de cinéma américain.
Et de temps en temps, un film qui ne cherche pas à réinventer la poudre, ça fait du bien.

La petite anecdote
Des Hommes Sans Loi, film australien? outre le réalisateur John Hillcoat et le scénariste et musicien Nick Cave, le casting compte plusieurs autres australiens: Jason Clarke qui joue le troisième frère, Guy Pearce et Mia Wasikowska.

Infos pratiques
Des Hommes Sans Loi
sorti le 12 septembre 2012 en France
réalisateur: John Hillcoat
avec: Tom Hardy, Shia LaBeouf, Guy Pearce, Jessica Chastain, Mia Wasikowka, Gary Oldman
bande-annonce: http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19337840&cfilm=200399.html 

lundi 3 septembre 2012

J'ai été voir... Starbuck


De temps en temps, des pépites nous arrivent du Canada: Les Invasions Barbares de Denys Arcand en 2002 ou C.R.A.Z.Y de Jean-Marc Vallée en 2005 par exemple.
En juin 2012, c'est Starbuck de Ken Scott qui arrive sur les écrans français, précédé d'une réputation de phénomène à suivre.

David Wosniak a 42 ans et vit comme un éternel adolescent. Alors que sa copine doute de sa capacité à devenir père, il découvre qu'il a engendré 533 enfants suite à ses dons de sperme. Et 152 d'entre eux souhaitent le rencontrer...

La situation de base est cocasse et déclenche d'emblée un sourire. L'accent québécois et les dialogues très bien écrits lancent les bases d'un cocktail détonnant.
S'y ajoutent un acteur principal en grande forme (Patrick Huard, comique reconnu au Canada) et une pincée de bons sentiments.

Vous l'aurez compris, Starbuck est une comédie... Ken Scott, réalisateur et scénariste, a choisi d'utiliser l'humour pour aborder la question de la paternité. Il a entouré son personnage central d'autres figures masculines qui répondent chacune à leur manière à ce sujet. David tente, à sa façon, d'aider ces (ses?) enfants.
Et au fil des blagues et des situations drôles, on s'interroge avec lui. Entre père et géniteur, il tente d'être une présence rassurante et protectrice pour ces jeunes dont il partage les gènes.

Il est surtout question de générosité dans Starbuck, puisque c'est le problème principal de David. Et c'est aussi le reproche qu'on peut faire au film: à vouloir trop donner, il en fait parfois un peu trop. Mais comment reprocher d'être trop généreux?...

On n'échappe pas à certains clichés, notamment concernant les rejetons de Starbuck. Tous les personnages-types sont représentés et cherchent à connaître leur géniteur (le sportif, l'artiste, l'handicapé...). 
Et n'oublions pas qu'on est dans un "feel-good movie" donc les bons sentiments débordent.
Mais l'ensemble est tellement bien ficelé et l'écriture drôlement fine. L'effet désiré est atteint: on sourit pendant tout le film.

Dans la galerie de personnages, mention spéciale au pote avocat, joué par Antoine Bertrand, hilarant!

Et enfin ouvrez les oreilles: la BO est très chouette.

Starbuck est un film charmant, généreux et bienveillant, qui traite avec humour et sans se prendre la tête de la question de la paternité.
Starbuck, film de l'été 2012?...

La petite anecdote
Pourquoi Starbuck? le surnom vient du taureau canadien légendaire Hanoverhill Starbuck, à la génétique quasi-parfaite et qui a ensemencé à lui seul 75% du cheptel de vaches Holstein d'Amérique du Nord. 

Infos pratiques
Starbuck
sorti le 27 juin 2012 en France
réalisateur: Ken Scott
avec: Patrick Huard, Julie Le Breton, Antoine Bertrand
bande-annonce: http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19346773&cfilm=182935.html