mardi 10 février 2015

Foxcatcher


Bennett Miller passe pour la 3ème fois derrière la caméra (après Truman Capote et Le Stratège) pour nous raconter une nouvelle histoire vraie. Déjà récompensé par le Prix de la Mise en Scène à Cannes, Foxcatcher est dans la course aux Oscars.

En 1986, le milliardaire John E. Du Pont ouvre un centre d'entraînement de lutte sur sa propriété de Pennsylvanie. Il invite les champions Mark et Dave Schultz à venir s'y entraîner en vue des JO de Séoul en 1988.

Foxcatcher est une leçon de mise en scène. Tout au long des 2h15 du film, les séquences s'enchaînent avec une grande fluidité. Les lumières, les couleurs et d'une façon générale les images sont maîtrisées de A à Z pour nous raconter la version de Miller de cette histoire.

Miller axe sa narration autour du trio de personnages: les frères Schultz (Channing Tatum, vu dans Magic Mike , 21 Jump Street  et actuellement à l'affiche dans Jupiter: le Destin de l'univers et Mark Ruffalo Collateral, Avengers, New York Melody) et le riche héritier John Du Pont (Steve Carell Crazy Stupid Love, Cet été-là et de nombreuses comédies de Judd Apatow). Ils sont tous les 3 impressionnants et Carell et Ruffalo sont nominés aux Oscars pour leur performance. 
Les maquillages et transformations physiques ont un aspect animal. Carell et son nez proéminent fait penser à un oiseau de proie alors que Tatum à un air de gorille avec sa démarche balourde.

Tout cela contribue à une atmosphère très particulière et malsaine, qui met vite le spectateur mal à l'aise. Personnages instables mentalement, relations de pouvoir et d'héritage, sport de contact très (très) rapproché: tout converge vers des relations ambiguës.
On découvre petit à petit l'ampleur de la folie de Du Pont et ce qui est encore plus dérangeant, à quel point son statut social et son argent le protège: il est inadapté socialement mais comme il est riche, on sourit à ses folies. Et il se passe forcément le pire quand le pouvoir et laissé dans les mains d'un instable.

Les thématiques abordées sont très nombreuses: entre le rêve patriotique américain, la place de la mère et l'absence du père et leurs effets, les ambitions sportives, les rivalités fraternelles... Cela peut sembler beaucoup mais le scénario distille ces idées de façon subtile et les mêle habilement.

Mais Foxcatcher est surtout un film portrait. Il y a beaucoup de non-dits, de sous-entendus qui passent par des regards appuyés, par des gestes de camaraderie. Cela donne un rythme volontairement lent au film, qui laisse s'installer une lourdeur. Les fans d'action seront sans doute frustrés.

Il manque tout de même un élément pour faire de Foxcatcher un sans-faute: la progression dramatique n'est pas utilisée à son maximum. On aimerait voir monter crescendo la tension de ce drame. Et pourtant, on reste froid face à l'enchaînement des événements, comme détachés.

Foxcatcher est une grande réussite sur le plan cinématographique: c'est un film diablement maîtrisé avec une direction d'acteurs impressionnante (Miller est également nominé pour l'Oscar du Meilleur réalisateur).
A elles seules les performances de Carell, Tatum et Ruffalo méritent le déplacement.
Un film lourd, poisseux et impur, à éviter les jours où vous avez besoin de vous remonter le moral.

La petite anecdote:
Dave Schultz était un excellent lutteur car il savait se battre des deux côtés. Il était également dyslexique et des études ont prouvé le lien entre dyslexie et ambidextrie.

Note:
4/5

Infos pratiques:
Foxcatcher
sorti le 21 janvier 2015 en France
réalisateur: Bennett Miller
avec: Channing Tatum, Steve Carell, Mark Ruffalo

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