lundi 13 octobre 2014

Saint Laurent


2014, année Saint Laurent. Après un premier biopic (très poli) sorti en janvier signé Jalil Lespert (Yves Saint Laurent), c'est Bertrand Bonello, réalisateur de L'Apollonide qui signe cette 2ème version en moins de 9 mois.

Décennie 1967-1976, dans un Paris de tous les excès, Yves Saint Laurent le couturier devient YSL, la marque planétaire.

Ce Saint Laurent est une commande: les frères Altmayer, producteurs, ont contacté Bonello pour lui proposer le sujet. Celui-ci à accepté à condition de pouvoir raconter sa propre vision de la vie de Saint Laurent.
Il en résulte un film miroir. Yves Saint Laurent, personnage narcissique, se cherche dans toutes les glaces, se retrouve dans des muses et se perd dans son propre reflet. Bonello réalisateur et artiste réfléchit aux effets de la célébrité, à la place du business dans le monde de l'art. 

La construction est assez biscornue et pas facile à décoder. En refusant une construction linéaire et chronologique, on fait des bonds dans les temps (au passé et au futur) et c'est assez déconcertant.
Ce Saint Laurent est un exercice de style. Bonello ne livre quasiment pas d'informations sur la biographie. Le couturier devient juste une image, un support à la réflexion. 

Le projet n'ayant pas été approuvé par Pierre Bergé (joué ici par Jérémie Rénier), l'équipe n'a eu accès à aucune archive et aucun lieu touchant la vie d'Yves Saint Laurent. Tout a été recréé et le résultat est visuellement assez réussi. Tout une séquence tourne autour de la conception et de la réalisation de la collection "Ballets Russes" de 1976 et le défilé est bluffant

Bonello a une façon de filmer qui peut être assez fatigante. Outre la durée du film (2h30), les nombreux gros plans de mains, pieds et autres ourlets de robes plombent un peu le film. Au nom du style visuel, j'ai trouvé qu'on tombait souvent dans de l'intellectualisation un peu inutile.

La seconde moitié du film explore la relation vénéneuse de Saint Laurent avec Jacques de Bascher, amant de Karl Lagerfeld. Le dandy va l'initier aux drogues et à des expériences sexuelles abusives qui vont petit à petit faire sombrer le créateur dans une dépendance et des abus en tous genre. Bonello choisit alors un style très immersif et plonge le spectateur dans la peau d'Yves Saint Laurent.
Car son sujet est là: qu'est-ce que cela signifie d'être Yves Saint Laurent? Artiste de génie, diva déconnectée de la réalité, constamment à la recherche de l'élégance et irrésistiblement attiré par le malsain.

Gaspard Ulliel prête son corps longiligne au couturier et trouve une diction qui, sans pousser le mimétisme, l'incarne très bien. Louis Garrel est l'amant démoniaque et magnétique. Seule Léa Seydoux fait un peu défaut en Loulou de La Falaise.

Sélectionné à Cannes en mai dernier, représentant la France aux prochains Oscars, Saint Laurent n'est pas un biopic comme un autre. C'est davantage une réflexion hypnotique sur la place de l'artiste. 2h30 de réflexion hypnotique, ponctuée de bonnes idées de mise en scène mais globalement trop intellectualisée pour moi.

La petite anecdote:
Ma prochaine lecture pour continuer à me plonger dans ce monde de style et de paillettes: Beautiful People d'Alicia Drake, qui retrace les vies parallèles de Saint Laurent et Lagerfeld.

Note:
2/5

Infos pratiques:
Saint Laurent
sorti le 24 septembre 2014 en France
réalisateur: Bertrand Bonello
avec: Gaspard Ulliel, Louis Garrel, Jérémie Rénier, Léa Seydoux, Helmut Berger

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