mercredi 15 octobre 2014

Mommy


De temps en temps, un film vous rappelle pourquoi le cinéma est un art qui touche de façon particulière et qui peut vous emmener très loin.
Mommy, le nouveau long-métrage du jeune québécois Xavier Dolan est de ceux-là.

Diane Desprès, veuve quadra, récupère la garde de son fils de 16 ans quand celui-ci est renvoyé pour violence du centre dans lequel il était placé. Ils vont apprendre à vivre ensemble, aidés par leur voisine.

Pour décrire Xavier Dolan, les journalistes s'emballent: génie, chef-d'oeuvre, sublime, extraordinaire, etc.
Le réalisateur de 25 ans en effet déjà 5 films à son actifs, dont 4 ont été sélectionnés à Cannes (J'ai tué ma mère en 2009 à la Quinzaine des Réalisateurs, Les Amours Imaginaires et Laurence Anyways en Un Certain Regard en 2010 et 2012 et Mommy en sélection officielle cette année). Il a même dû partager son Prix du Jury, reçu ex-aequo avec Jean-Luc Godard...
Et pourtant, je n'avais jamais été attirée par ses films. Gros choc donc en voyant Mommy

La figure de la mère est un thème qui l'inspire et on se demande presque comment un jeune homme de 25 ans peut écrire des rôles de femmes de 40 ans aussi beaux et complexes.

Steve est un ado hyperactif et constamment au bord de l'explosion. Il aime sa mère à sa façon et elle le lui rend bien. Mais leurs fêlures respectives rendent leur relation difficile et instable. Quand leur voisine vient compléter ce triangle, un certain équilibre s'installe. Leurs relations sont à la fois fascinantes et troublantes et Dolan parvient à les filmer avec une grande empathie.
Le caractère imprévisible des personnages nous maintient en état de tension du début à la fin des 2h15 que dure le film.

Les trois acteurs sont extraordinaires. 
Anne Dorval et Suzanne Clément sont des habituées du cinéma de Dolan. Elles composent ici les deux facettes d'une mère en même temps qu'une histoire d'amitié qui va au-delà des mots.
Steve est magistralement interprété par Antoine-Olivier Pilon, angélique autant que détestable, à qui le réalisateur avait déjà fait appel pour un clip d'Indochine (voir ci-dessous "La petite anecdote").

Dolan a choisi de filmer en format carré 1:1 qui, s'il surprend et gène un peu lors des premières minutes, prend tout son sens au fil du film. Steve et Diane sont enfermés, ils n'ont pas de porte de sortie et cela se traduit par ces plans serrés. Il n'y a de la place à l'écran que pour une personne à la fois.

Intégralement joué en joual, ce dialecte québécois haut en couleur, le film est sous-titré (le réalisateur a lui-même assuré la "traduction" en français) pour nous permettre de ne rien rater des échanges verbaux parfois violents.
C'est d'ailleurs un des seuls reproches que je peux faire: on frôle parfois l'hystérie et cela pèse par moments.

Ces personnages ambivalents, à la fois détestables et aimables, Dolan les filme sans aucun cynisme et provoque chez nous des réactions épidermiques. Il utilise notamment la musique comme un ingrédient à part entière de sa réalisation. Je n'aurai pas pensé être autant émue par une chanson de Céline Dion (sacrée d'ailleurs "trésor national" à l'occasion). 

Mommy est donc à ne pas rater. Préparez-vous à un tour en machine à laver dont vous allez ressortir secoué(e).
Et dire que Dolan n'a que 25 ans, à suivre de près...

La petite anecdote:
Xavier Dolan avait déjà tourné en format carré, pour un clip controversé, celui de la chanson College Boy d'Indochine. On y reconnaît également l'acteur Antoine-Olivier Pilon.
Attention, certaines images peuvent choquer.

Note:
4.5/5

Infos pratiques:
Mommy
sorti le 8 octobre 2014 en France
réalisateur: Xavier Dolan
avec: Anne Dorval, Antoine-Olivier Pilon, Suzanne Clément

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